I wanna hold your hand

25 novembre 2019

Jour 60 : Lundi

Je me suis occupée d'Hayden, ce matin. C'était son anniversaire aujourd'hui et elle est devenue une jolie petite fille.

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C'est juste si dur de se dire que sa maman ne sera plus jamais avec elle. La neige a fondu. Creuser la terre pour enterrer Enola n'en sera que plus simple. Après m'être occupée de Célian, je m'occupe de la corvée. C'est l'une des tâches les plus éprouvantes que j'ai effectuée ces dernières années... Autant mentalement que physiquement. Il faut dire que c'est aussi la première adulte a devoir être enterrée. Je termines ma tâche avant d'aller chercher les enfants. Eden nous a fabriqué une petite stèle. Je la porte avec moi en emmenant Billie, Hayden et Valentin jusque la tombe. Je la dépose.

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C'est Billie qui a choisit le lieu. Elle et Valentin sortent souvent courir dans la montagne, iels connaissent les lieux. Je dois avouer que cet endroit est bien choisit ! La vue depuis ce plateau est imprenable ! Il donne de l'autre côté de la montagne, le côté que nous ne voyons jamais, celui de la Rhéa. J'imagine que rien n'a été construit ici auparavant à cause de la difficulté d'accès du lieu, mais celui-ci n'est qu'à quelques minutes de notre cabane ! Enola aurait adoré. C'est en silence que nous disons adieu à ma petite sœur, la mère de mes deux nièces. Je doute qu'elles ne parviennent à se remettre de la perte de leur mère un jour... Ou bien est-ce moi qui n'y parviendra pas ?

Si les regards de Billie et d'Hayden sont rivés sur la tombe et le mien entre celle-ci et la Rhéa, celui de Valentin se promène dans le paysage, en contre-bas. D'un coup, il me murmure :

-Lana...

Je l'interroge du regard. Il me montre la forêt – celle dont l'incendie nous a forcé à quitter notre domicile - , en contre-bas, dans laquelle on devine quelques maisons.

-C'est ma maison.

Je le regarde, surprise, puis suis la direction de sa main. En pivotant légèrement ma tête sur la gauche, j’aperçois la Rhéa, dont une aile et la vieille chapelle semblent incendiées. J'aimerais tant passer à la Rhéa pendant que j'emmène Valentin retrouver sa mère, mais je ne sais pas quel genre de squatteurs je risquerais d'y trouver...

-Allons-y.

Je sèche mes larmes, du dos de ma main, et embrasse mes nièces.

-Eden vous attend à la maison, ne rentrez pas trop tard !

J'entraîne Valentin de mon bras. Nous entreprenons la descente. En passant à la cabane, je récupère une grande bouteille que je remplis d'eau et j'explique mon départ à Eden et Cory.

Nous marchons très longtemps. Arrivés en bas, je commence à chercher du regard des vélos : nous devons quitter la ville et un moyen de transport ne serait pas de refus ! Mais je ne trouve que des carcasses de voitures... Si j'avais le bonheur d'en trouver une encore en état de fonctionnement, je ne pense même pas que je saurais la conduire. Nous ne serions pas avancés. Je regarde Valentin alors que nous avançons. Il semble très pressé d'arriver. Je ne sais que très peu de chose de lui, en fait. Tout ce qu'il a bien voulu me dire, c'est comment sa mère et lui étaient pourchassé.es et se sont retrouvé.es séparé.es par la force des choses... Je lâche un léger soupir. J'espère vraiment ne pas avoir fait le mauvais choix en l’accueillant. Pourvu qu'il n'est pas été un piège, ou un appât.

Il nous faut une heure de marche, une fois sorti.es de la ville pour arriver jusque la maison de Valentin. Il semble se souvenir si bien du chemin, depuis que nous avons quitté la ville et sommes entré.es dans la forêt. Je deviens presque méfiante.

La maison est une cabane de forêt sur deux étages : une maison typique d'ici. Elle n'est pas éclairée, mais semble en bon état. Valentin se précipite sur la porte. Je garde une grande distance avec lui et la porte, par sécurité. Il toque.

-Maman ! Maman c'est moi !

Il ne s'arrête pas.

-Maman, ouvre moi !

Je me mords la lèvre. Malgré tout, j'aimerais pouvoir ramener ce petit garçon à sa maman ! A notre grande surprise, la porte finis par s'ouvrir, et une jeune femme sort sur le porche, en boitant et en se tenant à la chambranle de la porte. De ses yeux vitreux, elle fixe le petit garçon, devant elle, sans vraiment réagir.

-Maman !

Valentin se jette dans ses bras avant que je n'ai le temps de l'arrêter dans son mouvement. C'est elle qui le repousse.

-Va-t-en Valentin ! Tu dois partir !

Elle semble hurler avec toute la force qu'il reste dans son faible corps. Le Virus a pris possession d'elle. C'est trop tard pour cette jeune femme. Valentin, sous le choc, recule très lentement. Je vois les larmes s'emparer de ses petits yeux gris. Je vais à sa hauteur poser mes mains sur ses épaules et le reculer un peu plus encore. La mère pleure en silence. Elle me regarde dans les yeux, me demandant silencieusement de prendre soin de son enfant. D'un air entendu, j'hoche la tête.

-Quel est votre nom ?

-Cassandra.

J'acquiesce.

-J'espère que vous allez guérir, Cassandra.

Elle secoue la tête, le regard bas. Elle sait à quoi se résoudre, et à présent, Valentin aussi. Elle dit quand même, comme une sentence.

-Je t'aime fort, mon Valou. Je t'aimerais toujours.

Je guide Valentin par les épaules sur le chemin du retour. Il semble sans vie.

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La voix de Cassandra, derrière moi, m'appelle.

-Comment vous appelez vous ?

-Je suis Lana.

-Merci pour tout, Lana.

-Ce n'est rien.

Sur les heures de marche que nous avons pour rentrer, je surprends Valentin essuyer quelques larmes, toujours aussi silencieux qu'à l'aller. Nous avons pu voir sa mère, mais il est trop tard pour elle. Je guette les signes de la maladie sur Valentin. Il s'est jeté dans ses bras. Est-ce prudent de rentrer dès ce soir à la cabane ? J'imagine que Valentin aura déjà montré des signes de faiblesse le temps que nous arrivions là-haut.

Il semble ne rien avoir reçu de la maladie. C'est surprenant, mais tant mieux. Il s'est réfugié sur la falaise à l'extérieur de la cabane. Les yeux dans le vague, il fixe la ville, en contre-bas. Je lui ai laissé un temps seul, mais je pense qu'il est temps que j'aille le voir, à présent. Billie et Hayden se sont toutes les deux endormies, à l'intérieur de la cabane.

-Valentin... Tu vas bien ?

Il ne répond pas.

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-Je suis désolée, pour ta mère. Tu peux rester ici pour toujours si tu le souhaites. Tu seras toujours le bienvenue auprès de nous.

-Merci.

-Val... J'aimerais que tu m'expliques pour quelle raison ta mère et toi étiez-vous pourchassé.es...

Il tourne un instant son regard vers moi, sondant mes intentions, avant de revenir face à la ville.

-Maman a été soumise à des tests, bien avant que je naisse. Elle était avec d'autres enfants, dans un laboratoire. Iels l'ont forcé à prendre des médicaments puis l'ont fait ingérer le virus, petit à petit, pour la rendre résistante. Pour elle, ça à marché un peu, mais beaucoup d'enfants sont morts.

Ces enfants, soumis à des tests... Quelle cruauté !

-Quand elle est devenue plus grande, iels l'ont fait sortir. Iels disaient qu'iels voulaient la tester sur le terrain. C'est là qu'elle a rencontré mon papa et que je suis né. On vivait ici. On venait parfois nous chercher pour nous emmener au laboratoire, papa, maman et moi. Et un jour, en revenant, maman m'a expliqué qu'iels voulaient me faire ingérer le Virus comme iels lui avaient fait à elle, pour me rendre encore plus fort que je ne le suis déjà. Elle a fait mine d'accepter, mais c’était faux. On s'est enfuit, on s'est caché.es avec des gens, mais il a fallut qu'on sorte et un clan nous a trouvé. Iels ont tués mon papa, et j'ai perdu ma maman comme ça.

J'acquiesce.

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-Mais pourquoi ta mère est-elle rentrée dans votre ancienne maison ?

Il secoue la tête. Bien sûr, il n'en sait rien. J'imagine qu'elle n'avait plus de raison de fuir, alors elle est rentrée chez elle. J'aimerais bien le laisser tranquille, mais j'ai quand même une question à lui poser...

-Et les enfants du laboratoire où ta mère était, tu sais qui iels sont ?

Il secoue les épaules.

-Maman disait qu'elle y avait trouvé des ami.es de son ancienne école, de Hidden Spring. Mais elle ne m'a pas dit qui.

J'ouvre de grands yeux ronds. Son annonce me fait l'effet d'une décharge électrique. Était-ce la réponse que j'espérais avoir ou bien était-ce précisément ce que je redoutais ? Etait-il possible que Neal et Morgane aient fait partis de ces enfants ? Aurait-iels survécu ? Si oui, pourquoi ne nous avaient-iels pas retrouvé.es ? Cela prouvait-il qu'iels étaient mort.es ?

Je secoue ma tête pour chasser ces pensées. Je pose ma main sur l'épaule de Valentin, toujours secouée.

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-Rentre vite à la maison, Val.

Je retourne dans notre cabane, le laissant seul avec ses pensées. Depuis son berceau, Célian m'appelle.

-Hey bébé, je t'ai manqué, hein ? C'était bien avec papa, aujourd'hui ? Ce n'était pas la fête, hein...

Je lui caresse les cheveux. Depuis le petit miroir du mur de la chambre, j'observe mes traits. J'ai pris des rides. Je ne suis plus si jeune. Je repose Célian dans son lit pour qu'il s'endorme et quitte la chambre.

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